Les années 20-30, ce que nous appelons en histoire générale l'Entre Deux Guerres, voient s'affirmer les courants modernistes qui veulent s'affranchir du style « Beaux Arts » qui dominait la production architecturale jusqu'à la guerre de 14 ; c'est dans ce contexte que le style dit « ART DECO » va s'imposer auprès d'un grand nombre de jeunes architectes et tenir le haut du pavé dans l'architecture de prestige, tandis que ceux qu'on peut appeler les « purs et durs » de la modernité, derrière Le Corbusier, leur porte parole le plus connu, peinent à se faire entendre et reçoivent peu de commandes (la faible place qui leur est faite à l'exposition de 1925 est d'ailleurs symptomatique).

L'expression « Arts Déco » est en fait une abréviation passée dans le langage courant à partir de l'intitulé complet de l'Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes organisée à Paris en 1925 (en réalité, ce n'est que dans les années 60 que cette expression s'est imposée dans l'histoire de l'architecture).

En fait, une exposition de cette sorte était prévue en 1915, qui aurait été le couronnement de la période Art Nouveau ou Modern Style de la « Belle Epoque » d'avant 14, période qui, comme nous l'avons vu dans un chapitre précédent, avait connu un réel renouveau des arts décoratifs et de l'architecture elle-même ; ce projet devait aussi contribuer à relancer la position de la France et de Paris dans la compétition entre grands foyers de création artistique qui est déjà un enjeu en ce début de XXème siècle. La guerre qui éclate à l'été 14 conduit à l'annulation du projet qui ne se réalisera que 10 ans plus tard. Entre temps l'Europe aura connu l'émergence de l'art moderne dans la peinture (Fauvisme, Cubisme, Futurisme…) et les premières réalisations des architectes s'affirmant eux-mêmes « modernes » (Auguste Perret, Tony Garnier, Le Corbusier, Robert Mallet-Stevens…).

L'expo de 1925 verra ainsi la juxtaposition ou la confrontation, à travers un certain nombre de pavillons, de ces deux grands courants contemporains, l'un davantage préoccupé de renouvellement des arts décoratifs (notamment par la stylisation et la géométrisation des formes), l'autre plus centré sur les systèmes constructifs (particulièrement par l'usage du béton) ; deux pavillons surtout représentent cette modernité radicale : celui de « l'Esprit Nouveau » construit in extremis par Le Corbusier et celui de la jeune Union Soviétique d'alors, édifié par Melnikov auxquels on peut ajouter celui du tourisme de Mallet-Stevens. A noter aussi que dans la même enceinte s'exprime avec force un troisième courant promis à un grand avenir, le régionalisme, à travers notamment le « Village Français », section à part entière de l'expo (nous aborderons cette question, notamment le style « néo basque » qui se répand dans notre région au même moment ,dans une 2ème partie de notre travail qui sera publiée ultérieurement).

Un modernisme tempéré :



En effet, le style Arts Déco propose une modernité relativement consensuelle, recherchant une élégance qui le situe dans la grande tradition du « goût français » initiée aux XVIIème et XVIIIème siècles. Favorablement accueilli par une partie de l'élite financière et industrielle ouverte à la nouveauté, impulsé aussi par les milieux de la mode et du spectacle, ce mouvement connaît une grande diffusion en France et dans le monde dans les deux décennies qui suivent (par ex aux Etats Unis où il connaît un véritable âge d'or). Le lancement des nouveaux transatlantiques, « Ile de France » en 1927 et surtout « Normandie » en 1935, véritables ambassadeurs de ce « goût français » sur la grande route Europe-New York devenue un rendez-vous mondain, lui apportera une consécration internationale qui en marque l'apogée à la veille du 2ème conflit mondial.

Parallélement, l'Exposition Coloniale de 1931 (voir le Palais des Colonies d'Albert Laprade) et l'Exposition Internationale de 1937 (voir Palais de Chaillot et Palais de Tokyo) voient se consolider une forme de "classicisme moderne" (l'expression est de Louis Hautecoeur), retrouvant le goût du monumental à l'occasion de grandes commandes publiques et que ses détracteurs appelleront plutôt « académisme moderne ». Auguste Perret en sera un des plus éminents et influents représentant jusqu'aux années 50.

Une formule à succès



Sur la Côte Basque et son arrière-pays, il connaît un grand succès dans les stations balnéaires ou de villégiature plus ou moins mondaines (au même titre que le style « néo basque » qui se développe au même moment):
  • Biarritz (casino, musée de la mer, Hôtel Plaza…)
  • St Jean de Luz (casino-pergola de Mallet-Stevens aujourd'hui malheureusement défiguré)
  • Dax (Hôtel Splendid, Atrium-casino d'Albert Granet)
  • Bayonne (Bureau des Affaires Maritimes, Douanes)
  • Ajoutons Pau et son Boulevard des Pyrénées

Dans notre département, on trouvera tout naturellement de nombreux exemples dans les stations thermales ou touristiques comme Bagnères, Argelès, Lourdes, Capvern que nous présenterons dans la quatrième partie (principalement des hôtels). Par ailleurs, et bien que le contexte économique des années 30 ne soit guère porteur, certaines administrations ou services publics modernisent leurs locaux ou installations ce qui donne naissance à quelques édifices intéressants à analyser (pensons par exemple aux PTT qui modernisent services postaux et téléphoniques). C'est précisément par ces exemples que nous avons choisi d'ouvrir notre sélection de bâtiments.

L'Architecture du XX siècle en Hautes-Pyrénées
VOLET N°1 : UNE INTRODUCTION A L'ARCHITECTURE MODERNE
ART DECO ET MODERNISME DES ANNEES 20 ET 30
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Le style art déco
Travail de recherche
Maurice MORGA - Professeur retraité
Conception multimédia
Florent Lafabrie - CANOPE des Hautes-Pyrénées