Ce chapitre s'attachera à décrire et analyser des exemples de transformations architecturales intervenues sur des bâtiments existants, anciens ou pas, surtout depuis environ trois ou quatre décennies, soit des années 80 à aujourd'hui ; ces transformations, suscitées par des réaffectations d'édifices ou des reconversions de sites, s'accompagnent de réhabilitations du bâti, de restructurations des espaces intérieurs et de requalifications d'artères et d'espaces publics…tout un vocabulaire auquel de nombreux chantiers récents ou en cours nous ont habitués ; nous nous attacherons ici à clarifier ces notions en nous appuyant sur des exemples sélectionnés pour leur exemplarité.

Si ces phénomènes ont pris une ampleur inédite aujourd'hui, notamment dans le cadre de vastes opérations de remodelage urbain, un rapide coup d'oeil en arrière permet de se rendre compte qu'ils ne sont pas entièrement nouveaux ; en effet, les vicissitudes de l'histoire ont souvent été l'occasion de reconversions forcées ou de changements d'usages de bâtiments multiséculaires soudainement confrontés à une destinée imprévisible.

On songe par exemple aux effets de la Révolution française qui dans notre département comme dans l'ensemble du pays a vu de nombreux biens de l'Eglise, devenus « Biens Nationaux », être vendus aux enchères à des particuliers et connaitre par là un sort funeste :

  • l'abbaye bénédictine de St Sever de Rustan, devenue partiellement dépendances de ferme, voit son cloitre sauvé in extremis par son rachat par la ville de Tarbes en 1890.
  • le couvent des Carmes à Tarbes devient caserne puis entrepôt de fourrage pour l'armée au XIXème siècle, avant d'être détruit (seule subsiste l'actuelle église Ste Thérèse restaurée).
  • le couvent des Ursulines, près de la cathédrale de Tarbes, devient au XIXème la caserne Dembarrère avant d'être transformé en Cité Rothschild dans les années 1920.
  • citons pour terminer cette liste non exhaustive l'abbaye cistercienne de l'Escaladieu, vendue comme bien national en 1793 et dont le cloitre fut probablement vendu vers 1830 ; rachetée par le Conseil Général en 1997,elle est désormais un lieu important de la vie culturelle du département accueillant expositions, concerts, animations…etc ; un bel exemple de ces reconversions de lieux de cultes en lieux culturels dont un des derniers en date est, à Tarbes, la transformation de l'ancien Carmel en galerie d'exposition municipale (nous décrivons cet exemple dans la 2ème partie ci-dessous).

Plus près de nous, au milieu du XXème siècle citons aussi la vague d'achats et réaffectations de grandes villas bourgeoises en mairies comme celles de Bagnères de Bigorre, Lourdes, Pierrefitte…

Au-delà de la période funeste du vandalisme post révolutionnaire, maintes fois dénoncé depuis lors, on ne peut manquer de remarquer qu'on a continué à détruire sans beaucoup d'état d'âmes, et ce jusque dans les années 70, des édifices de grande valeur qui auraient pu trouver une nouvelle vie…songeons à la destruction de la halle Brauhauban à Tarbes ou la Halle aux Grains à Lannemezan (cf notre 1er volet, in « architecture du fer »/ « les vicissitudes de l'histoire »).

Ces réaffectations incontrôlées ou ces destructions pures et simples ne sont plus guère de mise aujourd'hui où l'on réfléchit davantage en terme de réhabilitation que de démolition, dans la mesure du possible (et la question financière est sur ce point particulièrement importante au-delà des problèmes de faisabilité technique). Ajoutons à ce propos que la solution ne réside pas dans un politique systématique de « patrimonisation » des édifices en danger (par exemple par classement en « monuments historiques » ou « patrimoine du XXème siècle ») car la liste est déjà longue des édifices classés ou inventoriés…qui imposent des contraintes et des crédits souvent hors de portée des collectivités territoriales ou des particuliers. Le danger serait alors de figer le paysage urbain et de paralyser l'évolution nécessaire des pratiques architecturales et de la pensée urbanistique. Si certains édifices méritent effectivement d'être protégés pour leur valeur architecturale, l'enjeu véritable réside dans notre capacité à « recycler » de manière raisonnée des édifices ou ensembles bâtis plus ordinaires dans les mutations en cours des espaces urbains (centraux ou périphériques) et des modes de vie qui l'accompagnent. Cela doit s'accompagner nécessairement d'une réflexion, si possible dépassionnée et raisonnable sur la question de la greffe de l'architecture contemporaine sur des bâtiments anciens.

Pour la commodité de l'exposé, nous avons choisi de présenter l'ensemble de ces questions en trois parties successives :

  • la 1ère, intitulée « les services publics » regroupera en effet un certain nombre d'exemples significatifs de réaffectations de bâtiments anciens à de nouvelles fonctions d'ordre administratif ou de service public (mairies, équipement ,enseignement…).
  • dans un 2ème partie, nous décrirons l'éclosion de nouveaux lieux culturels implantés dans des édifices qui n'avaient pas vocation à le devenir ce qui a entrainé leur restructuration. Nous consacrerons une sous partie à l'extension, dans les villes d'eaux, des thermes anciens sous forme de centres thermo-ludiques très à la mode aujourd'hui.
  • enfin, une 3ème partie nous permettra d'aborder la question de la reconquête des « friches urbaines » conséquence de la désindustrialisation subie par notre département au cours des 30 dernières années et du remodelage urbain qui s'ensuit (Tarbes et Bagnères) ; nous y ajouterons quelques localités à caractère péri urbain qui se sont lancées dans des opérations de requalification de leur centre ancien telles que Barbazan-Debat ou Andrest.





L'Architecture du XX siècle en Hautes-Pyrénées
VOLET N°2 : MARIER L'ANCIEN ET LE NOUVEAU
INTRODUCTION
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L'architecture transformée
Travail de recherche
Maurice MORGA - Professeur retraité
Conception multimédia
Florent Lafabrie - CANOPE des Hautes-Pyrénées