Dans un premier temps, la villa reste fidèle au modèle de la tradition classique : un pavillon avec deux niveaux sur un soubassement, un comble à la Mansart, une entrée, un vestibule et un escalier alignés au centre du plan.
Trois exemples à peu près contemporains, choisis dans trois villes différentes, montrent la persistance de ce modèle jusqu'aux toutes dernières années du XIXème.
Mais rapidement,
une nouvelle conception du confort, influencée entre autres par le modèle anglais (ex : le hall, le living room, les toilettes et salles de bain…), le désir d'ouvrir davantage et d'articuler la maison et le jardin (terrasses, pergolas, loggias…) conduisent à
une plus grande liberté dans les plans (organisation et distribution des espaces intérieurs) et dans
le choix des matériaux constructifs et décoratifs.
Nous illustrerons ce point par quelques réalisations de l'architecte local
Gustave Labat (auteur par ailleurs de la nouvelle façade du lycée Théophile Gautier en 1904-1905) qui dessine plusieurs villas à Tarbes et dans les villes d'eaux en ces mêmes années :
- le « Castel Mouly » à Bagnères de Bigorre (Avenue Prosper Noguès), assurément une des meilleures réalisations de l'architecte, est, par son agencement général et son articulation logis/jardin, une des plus proches du modèle de la « villa 1900 » teinté d'esprit Art Nouveau (voir par ex le portail qui affiche clairement son décor végétal).
- la villa Joliette à Capvern, de taille très modeste sur une parcelle minuscule, présente néanmoins un agréable décor dans lequel les chaînages en brique contribuent à élargir le volume du bâti.
- la maison de la Rue Eugène Ténot à Tarbes est surtout remarquable par ces mêmes chaînages de brique, bicolores, ponctués de triples modillons surmontant les linteaux des fenêtres, formant de véritables frises qui animent vivement les façades et unifient l'ensemble de l'édifice.
A travers ces premiers exemples, nous pouvons repérer facilement quelques caractéristiques significatives de ce « modern style » que nous retrouverons dans les exemples classés ci-après ( voir III et IV) :
- dans les villas, refus de la symétrie dans le plan et dans l'ordonnance des façades ; la construction d'une tour abritant souvent l'escalier principal, en retrait ou en avant du corps de logis donne à l'ensemble une allure de « castel » à caractère quelque peu ostentatoire. On tourne ainsi le dos à l'ordonnance du pavillon de tradition classique décrit plus haut.
Le plan asymétrique et la nouvelle articulation des fonctions de l'habitat imposent aussi des combles et couvertures relativement complexes (notamment encorbellements, charpentes débordantes traitées de manière décorative, pans de toit de différentes pentes…) qui fixent souvent l'identité visuelle originale de la villa1900.
- animation des façades par le recours à des balcons et loggias qui ouvrent sur l'extérieur
- une grande attention portée aux éléments décoratifs : d'où une polychromie assez répandue en façade par l'utilisation de matériaux de diverses couleurs (brique foraine, brique émaillée, céramique, crépis colorés, etc…) ; de même la qualité des fers forgés voire de la ferronnerie d'art (garde-corps des balcons, marquises protégeant les entrées).
En effet l'esprit Art Nouveau, c'était aussi
le rêve d'un art « total », en tout cas une volonté d'
intégration des arts autour de l'architecture, sculpture, peinture, arts décoratifs (meubles, vases, luminaires, papiers peints…) venant s'agglomérer dans le cadre d'un programme homogène défini par le commanditaire. De même, l'Art Nouveau voulait
réconcilier les arts traditionnels avec la technique et les matériaux modernes fournis par l'industrie : localement par exemple, on constate la diffusion à grande échelle des matériaux de la tuilerie Oustau d'Aureilhan, à Tarbes et ses environs.